La HAICA rejette la décision de la présidence du gouvernement de limoger le PDG de la télévision tunisienne
La Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle (HAICA) a reçu le 16 juin 2017 un courrier de la part de la Présidence du Gouvernement – dont le contenu a déjà été révélé par les médias – l’informant de la décision du Président du Gouvernement de relever le Président-Directeur général de la Télévision Tunisienne, M. Elyès Gharbi de ses fonctions sans avancer aucune explication ou raison justifiant cette décision.
A l’issue de sa réunion tenue le samedi 17 juin 2017, le Conseil de la HAICA tient à informer l’opinion publique de ce qui suit:
- La HAICA refuse la décision de la Présidence du Gouvernement relative à la révocation du Président-Directeur général de la Télévision Tunisienne, considérant qu’elle est contraire aux dispositions du dernier paragraphe de l’Article 19 du Décret-Loi N° 116 de l’année 2011, relatif à l’avis conforme de la HAICA. Cette décision ne respecte pas le principe de parallélisme des formes et des procédures concernant la nomination des présidents directeurs généraux des établissements publics de la communication audiovisuelle ou leur révocation ;
- L’avis conforme émis par la HAICA en septembre 2016 concernant la nomination de M. Elyès Gharbi – candidat unique proposé par le Gouvernement et avec insistance– avait été formulé au titre de sa volonté de contribuer à résoudre la crise engendrée par la vacance du poste de PDG de l’établissement de la Télévision Tunisienne ; cet avis était émis sous réserve de la conclusion ultérieure d’un contrat avec le PDG proposé, précisant les objectifs et les moyens, impliquant l’engagement des différentes parties concernées et comprenant des mécanismes d’évaluation.
- La HAICA souligne que son rejet de la décision du Gouvernement n’est nullement lié au soutien à des personnes en particulier, mais qu’il résulte de la persistance du Gouvernement à prendre des décisions de façon unilatérale concernant le secteur public de l’information. Or ceci constitue une régression dans le processus de réforme de ce secteur et de l’avènement de l’indépendance de sa ligne éditoriale.
- La HAICA met l’accent sur le fait qu’il est simpliste voire outrancier, de réduire la solution de la crise de l’audiovisuel public au simple remplacement du Président-Directeur général. La question est bien plus profonde ; le Gouvernement, sensé se ranger du côté de ceux qui cherchent des solutions efficaces, s’est révélé comme étant l’une des entraves principales à l’indépendance de ce service public et à sa réforme ;
- Les tentatives du Gouvernement de mettre la main sur les médias de service public apparaîssent désormais de façon claire et manifeste, d’autant que nous sommes à la veille d’un rendez-vous électoral historique, à savoir les élections municipales, ce qui exige la protection des établissements du secteur public de l’information de toute tentative de manipulation ou d’exploitation partisane.
La HAICA, tout en appelant la Présidence du Gouvernement à revenir sur sa décision illégale, se réserve le droit de recourir à la Justice, afin de s’opposer aux tentatives répétées pour un retour à une conception de l’information gouvernementale basée sur l’orientation de l’opinion publique et sur la propagande.
La HAICA appelle l’Assemblée des Représentants du Peuple à intervenir pour exiger que le Gouvernement respecte les lois. Elle appelle également la société civile et toutes les forces démocratiques ainsi que les organisations professionnelles à se mobiliser pour défendre les valeurs de liberté telles qu’énoncées dans la Constitution et à contribuer à l’ancrage des principes démocratiques et imposer leur respect.
Pour la Haute Autorité Indépendante
de la Communication Audiovisuelle
Le Président
Nouri Lajmi