Les instances indépendantes jouent un rôle majeur dans la société des égaux
- La Commission de Venise, en collaboration avec le Conseil de l’Europe et le Ministère tunisien des Affaires Etrangères, a rassemblé les instances indépendantes Tunisiennes, des homologues d’autres pays arabes et européens et des experts internationaux, pour rappeler l’enjeu que représentent ces instances dans le processus démocratique tunisien.
- Des dizaines de propositions ont été formulées pour renforcer la place et le rôle de ces instances dans leur paysage respectif.
- En tant qu’instance indépendante active dans un secteur sensible, la HAICA a largement pris part à l’événement.
- À l’aube de la discussion d’un nouveau projet de loi sur l’audiovisuel, la HAICA entend rappeler la nécessité de garantir l’indépendance de l’instance de régulation et l’importance de disposer des moyens nécessaires pour pérenniser la régulation du paysage médiatique tunisien.
La crise des institutions et les difficultés que rencontrent les instances sont l’expression d’une crise plus large. Chafik Sarsar, ancien Président de l’Instance supérieure indépendante pour les élections ne mâche pas ses mots. Il n’a pas manqué de souligner les risquent qui pèsent sur le processus démocratique symbolisé par les instances indépendantes tunisiennes, mais aussi les nombreuses opportunités que représentent ces instances pour garantir les droits de tous les citoyens. Le séminaire s’est déroulé sur deux journées et a donné lieu à des propositions concrètes de la part des intervenants. Objectif : renforcer le rôle des instances indépendantes et les pérenniser à l’intérieur du paysage tunisien.
La HAICA comme garante des droits des citoyens
Depuis la révolution, la multiplication de ces instances indépendantes symbolise l’enclenchement d’un long processus démocratique, mais témoigne aussi et surtout d’un besoin impératif de créer un équilibre pour contrebalancer les pouvoirs et les autorités classiques, tant politiques qu’administratives. Dans ce contexte, l’indépendance de ces instances doit être définitivement coulée dans la loi, mais doit aussi être intégrée dans des processus clairs et transparents, notamment au niveau de la nomination des membres de ces instances. Pour Nouri Lajmi, cette clarification est d’autant plus importante que ces instances « symbolisent un idéal démocratique qui favorise la société des égaux ». Un contre-pouvoir au service des citoyens et des citoyennes tunisiennes dont l’indépendance doit être totale.
Dans un contexte où la loi organique[1] de la HAICA sera prochainement discutée devant le Parlement, ce séminaire répond à un réel besoin du régulateur des médias tunisiens, représenté par son Président Nouri Lajmi. Cette loi devra se pencher sur des objectifs de régulation majeurs et plus particulièrement sur le fonctionnement futur de la HAICA et du secteur des médias.
Le paysage médiatique : un environnement sensible
En Tunisie, comme ailleurs, le paysage médiatique reste un secteur convoité et courtisé par les politiques. Les médias ont un rôle performateur important. Ils traitent les élections, diffusent les informations et la culture tunisienne. Ils sont en quelque sorte le miroir de la société tout en contribuant à forger son image de demain. Réguler ce secteur, avec les moyens et les marges de manœuvre nécessaires, sont au cœur de la mission de l’instance de régulation.
Nouri Lajmi insiste sur l’importance aujourd’hui d’accompagner la libéralisation des secteurs médiatiques, mais au vu des dysfonctionnements dont font preuve les médias, « l’indépendance de l’audiovisuel n’est pas une mince affaire. L’héritage du passé pèse. Une grande inquiétude guette la HAICA quant à l’avenir de son statut et de son indépendance. Le Président de la HAICA souligne enfin ces risques « invisibles » par les citoyens qui pèsent sur la HAICA et qui pourraient mettre à mal son fonctionnement, voir son existence. Le financement de l’instance par exemple, encore trop dépendant du bon vouloir des pouvoirs en place. Nouri Lajmi conclut son discours en posant une question à l’assemblée : « Peut-on aujourd’hui encore imaginer un système démocratique où des matières aussi fondamentales que les élections, les droits de l’hommes, ou encore de l’accès à l’information soient l’apanage du Gouvernement, aussi légitime soit-il ? Je pense que vous avez toute et tous en tête ma réponse.
Des mesures concrètes proposées par les instances
Tout au long du séminaire, des propositions d’amélioration concrètes ont été présentées par les participant.e.s. Elles pointent pour la plupart un besoin exprimé par ces instances de renforcer leur existence dans la loi et de mieux définir les règles qui les régissent. Contrairement à de nombreux pays, notamment européens, la Tunisie a coulé l’existence des instances indépendantes à l’intérieur même de sa constitution[2]. Une réelle avancée et une richesse qui doit maintenant, selon les participants, être confortée en octroyant des garanties à ces instances publiques indépendantes. Parmi elles, l’inscription d’une section spéciale dans la loi de finance relative à leur budget, s’assurer des garanties nécessaires au niveau de l’élection de leurs membres par le parlement, afin d’éviter les marchandages politiques toujours possibles.